Chamois

Fiche d’identité

  • Nom vernaculaire : chamois (français et anglais)
  • Nom latin : Rupicapra rupicapra (Linnée, 1758)
  • Dénomination
    • Jeune de moins d’un an = chevreau ;
    • Mâle âgé d'un an = éterlou ;
    • Femelle âgée d'un an = éterle ;
    • Mâle adulte = bouc ; Femelle adulte = chèvre.
  • Sous-espèces présentes en France : Rupicapra rupicapra rupicapra (Linnée, 1758), le chamois des Alpes et Rupicapra rupicapra cartusiana (Couturier, 1938), le chamois de la Chartreuse
  • Classification : Mammifère / Ongulé / Bovidé
  • Statut de conservation (UICN) dans le monde, en Europe et en France :
    • Chamois des Alpes : Préoccupation mineure (LC), état de conservation favorable selon l’Annexe V de la Directive « Habitat-Faune-Flore » ;
    • Chamois de la Chartreuse : vulnérable
  • Statut règlementaire :
    • En France, le chamois est une espèce chassable selon l’Arrêté du 26 juin 1987 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée depuis 1989 ;
    • Désigné au sein de l'annexe V de la Directive « Habitat-Faune-Flore » comme «espèce animale d’intérêt communautaire dont le prélèvement dans la nature et l’exploitation sont susceptibles de faire l’objet de mesures de gestion».

 

Pour la suite de la fiche espèce, seul le chamois des Alpes (sous-espèce rupicapra), présente au sein du massif jurassien, sera décrite.

Chamois photographié dans le massif jurassien © A. DEROZE

 

Chamois photographié dans le massif jurassien © A. DEROZE

 

 

 

Régime alimentaire et place dans la chaîne alimentaire

Le chamois est un herbivore strict.

 

Ayant un système digestif performant, il peut consommer des végétaux de faible valeur nutritive, aussi bien ligneux qu’herbacés, avec tout de même une préférence pour les herbacés et les légumineuses.

 

Les espèces consommées varient selon les saisons et les conditions climatiques. En effet, en hiver, si les plantes herbacées sont accessibles, ce dernier les consomme préférentiellement en grattant le sol pour les dégager de la neige. Dans le cas contraire, il se rabat sur des ligneux voire de la mousse ou du lichen. L'abroutissement du chamois sur les espèces ligneuses peut ponctuellement susciter des enjeux liés à l'exploitation forestière.

 

Le chamois boit très peu et satisfait ses besoins en eau en absorbant celle contenue dans les végétaux qu’il consomme. Par ailleurs, comme la plupart des ruminants,  il a besoin de sel et lèche des roches qui en sont recouvertes ou des pierres déposées par les éleveurs dans les alpages pour satisfaire ses besoins.

 

Les prédateurs naturels du chamois sont le lynx, le loup et plus rarement l’aigle royal (sur les chevreaux). Il est également chassé dans le cadre de plans de chasse.

 Consommation de ligneux par un chamois © JL Guillermoz

Abroutissement d'un chamois sur des espèces ligneuses © JL GUILLERMOZ

 

Reproduction et paramètres démographiques

 

La maturité sexuelle est atteinte à 1 an ½ chez les deux sexes bien que les femelles aient souvent leur 1er chevreau à 3 ans et les mâles participent au rut pour la première fois vers 3 ou 4 ans.

 

Le cycle de reproduction du chamois se déroule de la façon suivante:

 

 

Cycle de reproduction de la femelle chamois, d’après un dessin original de Robert Corti (ONCFS) et extrait de l'ouvrage Le Chamois, Biologie et Ecologie - Études dans le massif des Bauges de J-M. JULLIEN, 2017

 

Mode de vie

 La séparation de la mère est de son chevreau s’effectue vers 2 ans pour les femelles et un peu plus tôt pour les mâles. Suite à cette séparation, la structure sociale est différente selon les sexes et les périodes de l’année.

 

En effet, les mâles adultes sont plutôt solitaires. Ils peuvent parfois se rassembler en petits groupes avec des éterlous ou lors du rut où ils intègrent des hardes de femelles pour la reproduction. Mais ces regroupements sont instables et ne caractérisent pas leur mode vie annuel.

 

Quant aux femelles, elles vivent en chevrée pouvant aller jusqu’à une trentaine d’individus hors période de rut (rassemblement de femelles et des jeunes) et en grosses hardes pouvant aller jusqu’à une centaine d’individus pendant la période de reproduction en novembre/décembre.

Le chamois est organisé en

Le chamois est organisé en "chevrée" © JL GUILLERMOZ

 

Domaines vitaux

Jeunes, les mâles sont très mobiles. On estime que leur domaine vital (zone où l’animal se nourrit, se reproduit, se repose et se déplace quotidiennement) est en moyenne de 400 ha. Avec le temps, cette aire se réduit, les mâles âgés étant alors fidèles à des domaines vitaux de quelques dizaines d’hectares. Une étude dans les Bauges a montré qu’après la séparation de leur mère, les éterlous partent à plus de 1500m de leur lieu de naissance. Mais il arrive que certains individus dispersent à plusieurs dizaines de km (voici ici).

 

Les femelles quant à elles partent moins loin du lieu où elles sont nées, en moyenne à moins de 800m du domaine vital de leur mère. De même, leur domaine vital est beaucoup plus restreint que celui des mâles avec une aire moyenne de 160 ha. Une forte variabilité a cependant été observée dans les Bauges où certaines chèvres avaient un domaine vital de 94,5 ha et d’autres de 450 ha.

 

Exemples de domaines vitaux de chamois observés dans le Jura.  Important: pour assurer la quiétude des individus, seules les données des ongulés morts seront présentées de façon détaillée sur ce site.

Exemple de domaine vital d'une femelle de 4 ans suivie grâce à un collier GPS

Exemple de domaine vital d'une femelle de 4 ans suivie grâce à un collier GPS

Exemple de domaine vital d'un mâle de 10 ans suivi grâce à un collier GPS. Cet individu disposait de deux domaines vitaux distincts selon la saison.

Exemple de domaine vital d'un mâle de 10 ans suivi grâce à un collier GPS. Cet individu disposait de deux domaines vitaux distincts selon la saison.

Habitats

Les chamois utilisent divers habitats et se répartissent dans l’espace différemment selon les saisons.

 

Dans les Alpes, en été, ils vivent préférentiellement dans les pâturages ou les éboulis d’altitude aux expositions les plus fraîches. En automne, les animaux se retrouvent dans les pâturages en limite supérieure de forêt. Durant l’hiver, les chamois changent généralement de versant pour accéder à des expositions chaudes en zone plutôt boisée et escarpée. Enfin, au printemps, on retrouve généralement les chamois à basse altitude où le déneigement est le plus précoce et l’accès à la nourriture le plus important.

 

Les milieux étant différents dans le massif jurassien, il est probable que les résultats soient différents du massif alpin, comme en témoigne l'analyse globale ci-contre réalisée à l'échelle de l'aire de présence du Chamois dans le massif Jurassien. Effectivement, dans le massif Jurassien, le chamois semble beaucoup plus occuper des zones boisées. 

Milieux occupés par le chamois dans le massif jurassien, sur la base de l'aire de présence de l'espèce en 2010.  © A. BARBOIRON, C. SAINT-ANDRIEUX, B GUIBERT, OFB, FNC, FDC, 2016

 

 

Historique de la répartition du chamois en France et dans le Jura

Il y a 10 000 ans, le chamois était présent du massif Jurassien jusqu’en Provence en passant par le Massif Central, la Dordogne et les Cévennes.

Cependant au début du XIXème siècle, du fait du développement des activités agro-sylvo-pastorales et de la chasse, cette espèce ne se retrouvait plus qu’en milieu montagnard pour ne subsister que dans les Alpes où elle s’est maintenue jusqu’à aujourd’hui.

Au milieu du XXème siècle, grâce à la mise en place de mesures de protection, de réintroductions et de renforcements de populations, le chamois va voir son aire de répartition augmenter. Ses populations sont depuis lors en expansion sur le territoire français.

 

Carte de répartition du chamois des Alpes en France en 1988 (à gauche) et en 2016 (à droite), d’après l’ONCFS, la FNC et les FDC dans le cadre du Réseau Ongulés Sauvages

 

En 2016, l’aire de répartition du chamois couvrait plus de 24 000 km² en France répartis sur 23 départements, principalement dans les massifs des Alpes, du Jura, des Vosges et d'Auvergne.

 

Dans le Massif Jurassien, le chamois est réapparu naturellement vers la fin du XIXème siècle. Ce n’est qu’entre 1950 et 1962 que le chamois connaît une extension rapide suite à la réintroduction de 84 individus provenant des Alpes dans le Jura Suisse. Parallèlement, les Fédérations Départementales de Chasseurs ont instauré de grandes réserves intercommunales, au sein desquelles la chasse du chamois était interdite. Cela a permis d'accompagner la colonisation du massif. 

  

Le chamois des Alpes, un animal soumis au plan de chasse

Depuis 1989, la chasse du chamois est autorisée sur le territoire français. Cette espèce est obligatoirement soumise au plan de chasse (quotas fixés annuellement) avec toutefois des modalités différentes selon les départements.

 

Au niveau national, les prélèvements ont augmenté jusque dans les années 2000, puis ils se sont stabilisés ces dernières années avec 12 735 prélèvements en 2016.

  

À l’échelle du massif Jurassien (départements de l’Ain, du Doubs et du Jura), les prélèvements ont fortement augmenté jusque dans les années 2000 et ont connu une diminution jusqu’en 2012.

A cette époque, les Indicateurs de Changement Ecologique (outils de suivi des relations entre les populations d'ongulés et leur environnement) n'étaient pas encore développés, ce qui ne permet pas de connaître les causes de cette régression. Il est probable que celle-ci soit multifactorielle (effet de densité dépendance, problèmes sanitaires, colonisation du Lynx boréal, prélèvements de chasse).

Depuis, les prélèvements sur le massif repartent à la hausse avec une stagnation dans le département du Jura.  

 

Les rôles respectifs de la chasse et de la prédation par le Lynx boréal dans ces fluctuations des populations restent encore assez peu connus.

 

Ainsi, le projet vise à comprendre ces observations.

 Tableau de chasse national du chamois de 1972 à 2016,  RÉSEAU ONGULÉS SAUVAGES (FNC, FDC, OFB)

Tableau de chasse national du chamois de 1972 à 2016,  RÉSEAU ONGULÉS SAUVAGES (FNC, FDC, OFB)

Evolution des prélèvements de chamois par la chasse dans les départements de l’Ain, du Doubs et du Jura - données issues de RÉSEAU ONGULÉS SAUVAGES (FNC, FDC, OFB) 2018

Evolution des prélèvements de chamois par la chasse dans les départements de l’Ain, du Doubs et du Jura - données issues de RÉSEAU ONGULÉS SAUVAGES (FNC, FDC, OFB) 2018

 

 

 

Bibliographie/sitographie

Association Nationale des chasseurs de grand gibier s. d. Le chamois [WWW Document]. URL https://www.ancgg.org/especes_chamois.asp (consulté le 5.10.21).

 

Barboiron A., Saint-Andrieux C., Garel M., Calenge C., Guibert B. 2018. Inventaire des populations françaises d’ongulés de montagne, Mise à jour 2016 Faune sauvage, 44.

 

Bideau E., Vincent J.-P., Maire F. 2014. Evolution saisonnière de la taille des groupes chez le chevreuil en milieu forestier. Société nationale de protection de la nature et d’acclimatation, Revue d’Ecologie 37, 9.

 

Collin P. 2020. Le chamois, espèce autochtone dans le massif du jura ? 3.

 

Conseil des communautés européennes 1992. Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages. OPOCE.

 

Corti R., Pascal M., Vigne J.-D. 2003. Le chamois : Rupicapra rupicapra (Linné, 1758) (Rapport au Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable (Direction de la nature et des paysages)), Evolution holocène de la faune de Vertébrés de France : invasions et disparitions. Institut National de la Recherche Agronomique, Centre National de la Recherche Scientifique, Muséum National d’Histoire Naturelle, Paris, France.

 

Espunyes J., Bartolomé J., Garel M., Gálvez-Cerón A., Aguilar X.F., Colom-Cadena A., Calleja J.A., Gassó D., Jarque L., Lavín S., Marco I., Serrano E. 2019. Seasonal diet composition of Pyrenean chamois is mainly shaped by primary production waves. PLOS ONE 14, e0210819. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0210819

 

Fédération Départementale des Chasseurs du Jura s. d. Schéma Départemental de gestion cynégétique.

 

Jullien J.-M., Cornillon M. 2017. Le chamois, biologie et écologie, études dans le massif des Bauges, 2ème édition. ed. biotope éditions, Mèze.

  

Metayer M.-A.L. 2009. Fiche chamois, Parc Naturel Régional du Haut Jura. ed. ministre délégué auprès du ministre de l’équipement, du logement, de l’aménagement du territoire et des transports, chargé de l’environnement 1987. Arrêté du 26 juin 1987 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée.

 

Muséum National d’Histoire Naturelle 2003a. Chamois de la Chartreuse Rupicapra rupicapra cartusiana (Couturier, 1938) - INPN [WWW Document]. Inventaire National du Patrimoine Naturel. URL https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/61125 (consulté le 4.22.21).

 

Muséum National d’Histoire Naturelle 2003b. Espèces de la Directive « Habitats-Faune-Flore » - INPN [WWW Document]. https://inpn.mnhn.fr URL https://inpn.mnhn.fr/programme/evaluation/espece/61119 (consulté le 4.22.21).

 

Muséum National d’Histoire Naturelle 2003c. Présentation de Rupicapra rupicapra rupicapra (Linnaeus, 1758) - INPN [WWW Document]. Inventaire National du Patrimoine Naturel. URL https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/61121 (consulté le 4.22.21).

 

Muséum National d’Histoire Naturelle 2003d. Statut de protection de Rupicapra rupicapra (Linnaeus, 1758) - INPN [WWW Document]. Inventaire National du Patrimoine Naturel. URL https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/61119 (consulté le 4.22.21).

 

Muséum National d’Histoire Naturelle 2003e. Taxonomie de Rupicapra rupicapra (Linnaeus, 1758) - INPN [WWW Document]. Inventaire National du Patrimoine Naturel. URL https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/61119 (consulté le 4.22.21).

 

ONCFS 2018. Fiche Espèce/Habitat : Le chamois et l’isard.

 

Pioz M., Loison A., Gauthier D., Gibert P., Jullien J.-M., Artois M., Gilot-Fromont E. 2008. Diseases and reproductive success in a wild mammal: example in the alpine chamois. Oecologia 155, 691‑704.

 

Préfet du Jura s. d. Arrêté n°2019-07-11-001 fixant les modalités de chasse et le plan de chasse grand gibier (cerf - chamois - daim - mouflon) pour la campagne 2019-2020.

 

Prunier P., Boissezon A. 2016. Du Reculet aux sommets alpins : quels changements sur les crêtes ?, Réserve naturelle nationale de la Haute Chaîne du Jura, Communauté de communes du Pays de Gex. ed, Les cahiers de la réserve naturelle.

 

Actes du colloque scientifique Reculet, Gex.

 

Réseau Ongulés Sauvages 2011. Le Chamois des Alpes Rupicapra rupicapra rupicapra (Enquete ongules montagne). ONCFS / FNC / FDC, France.

 

Yockney I.J., Hickling G.J. 2000. Distribution and diet of chamois (Rupicapra rupicapra) in Westland forests, South Island, New Zealand. New Zealand Journal of Ecology 24, 31‑38.